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16 février 2016 2 16 /02 /février /2016 16:37

J'aime beaucoup les fées dans le folklore. Dans les anciennes croyances, les fées étaient des créatures magiques dont on ignorais les motivations. Parfois elles étaient "sympathiques" (elles peuvent rendre service, mais à un prix), à d'autres moments elles étaient malicieuses (voire démoniaques), et enfin à d'autres elles étaient juste étranges. En plus, elles enlevaient les nourrissons pour y lancer des changeling. Bref, on ne voulait pas avoir à faire à des fées. Les gentilles fées de type Clochette sont arrivées beaucoup plus tard au XIXième siècle, et ce sont elles (plus les interprétations de Disney) qui ont conditionné l'image que l'on a des fées aujourd'hui.

Bref, j'adore les fées, et j'essaye toujours d'en glisser dans mes univers (bon sang, c'est tellement arrogant). Et j'ai développé un certain attrait pour les contes de fée, mais dans les versions les plus proches du folklore possible (i.e. avec une influence chrétienne limitée, et surtout pas la version Disney). D'ailleurs, le recueil de contes des frères Grimm est sur ma liste de souhait depuis trop longtemps maintenant.

C'est en cherchant des livres qui parlaient des fées que je suis tombé sur l’Épée Brisée de Poul Anderson (l'homme derrière Trois Cœurs, Trois Lions). D'après Michael Moorcoock, c'est la lecture de l'Epée Brisée qui lui aurait inspiré pas mal d'éléments que l'on retrouve dans les aventures d'Elric. Ce fut une lecture déterminante pour lui, et j'ai voulu savoir pourquoi.

Au départ, je n'ai pas voulu écrire d'article sur ce livre. A l'époque (ça va faire un peu plus d'un an maintenant), j'avais d'autres choses à gérer, et finalement, les mois sont passés. En même temps, le livre trottait dans ma tête, et comme je constate le peu d'amour dont il bénéficie, je me suis décidé à écrire un petit article dessus, histoire de faire un peu de bruit.

L'Epée Brisée

L’histoire se déroule en Europe du Nord, dans une époque où le christianisme commence à atteindre ces régions et où les vikings faisaient encore des raids sur les côtes anglaises. Nous suivons les aventures de Skafloc, un guerrier qui a été enlevé par des elfes alors qu'il était nourisson. Skafloc se verra offrir une épée brisée par les dieux lors de la cérémonie de son nom. Mais tout le monde dans l'audience se doute qu'un cadeau des dieux est un cadeau empoisonné.

Skafloc est un atout précieux pour les Elfes, il peut manier le fer. En dépit de leur manque d'empathie, les Elfes l'élevèrent comme l'un des leurs et lui apprirent leurs secrets. Alors qu'elle était composée de batailles contres les trolls, ennemis des elfes, et de ballades dans la forêt, Skafloc fait la rencontre de Freda, une jeune femme. Avec elle, il découvrira l'amour, ainsi que l'humanité.

Lorsqu'elle sera mise en danger par son doppelganger, allié aux trolls, Skafloc n'aura d'autre choix que reforger l'épée et déchaîner sa puissance. Une puissance assoiffée de meurtres et capable de faire trembler les fondations du monde.

Alors que Trois Coeurs, Trois Lions cherchait du côté du conte, l'Epée Brisée s'inscrit dans le registre de la saga, c'est-à-dire, en reprenant les mots de Régis Boyer, " un récit en prose, toujours en prose, ce point est capital, rapportant la vie et les faits et gestes d'un personnage, digne de mémoire pour diverses raisons, depuis sa naissance jusqu'à sa mort." On aurait alors ici la saga de Skaflok. Mais autant, cette aventure est la saga de Skaflok, l’Épée Brisée est aussi l'histoire de Valgard, le changeling. En dépit de n'être qu'un connard sans âme (littérallement), toute sa vie, il ne sera que le pion de forces qui lui sont supérieures. L'Epée Brisée s'inscrit bien dans la continuité de la plupart des épopées, c'est une tragédie où il est impossible d'échapper à son destin.

On n'est pas un univers où le bien et le mal sont clairement définis. Le conflit initial est issu d'une question de survie et du désir de vengeance qu'elle a entraîné. De ce flou moral, l'exemple le plus parlant est celui des Elfes qui ont é(n)levé Skaflok. S'ils sont agréables à regarder, ils n'en sont pas moins incapables de tisser des liens émotionnels forts. Même les trolls ont, par moment, l'air plus sympathiques que les Elfes. Les dieux ne sont pas tellement mieux de ce point de vue. Odin, est un vrai connard qui sert d'abord ses intérêts.

En regardant bien, aussi belle et épique qu'elle soit, cette saga ne s'apparente qu'à une note de bas de page dans l'Histoire. D'abord, parce qu'elle s'inscrit dans un conflit particulier, entre les Elfes et les Trolls qui n'est qu'une guerre de substitution entre les Ases et les Jotunn (il y a ici un écho avec la Guerre Froide, et les guerre par proxy entre les Etats-Unis et l'URSS). Donc déjà, on n'est plus sur la même échelle, mais surtout le livre indique bien que les jours des entités surnaturelles scandinaves (comme avant eux, les créatures fantastiques grecques) sont comptés avec l’avènement du christianisme.

Enfin, Michael Moorcock expliquait que l’Epée Brisée se plaçait comme une espèce d'antithèse du travail de Tolkien, reprenant les mêmes éléments (mythologie germanique, folklore européen) pour construire quelque chose de plus sombre et "adulte" (ou comment détruire un argumentaire avec un seul mot). Pourtant, ce livre se rapproche pas mal d'un autre livre de Tolkien, les Enfants de Hurin, qui raconte les conséquences des actions d'un père sur sa descendance, la relation entre un frère et sa sœur et comment une épée sombre consume le héros. A lire.

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15 novembre 2015 7 15 /11 /novembre /2015 21:14

J'en ai parlé dans l'article sur Kill la Kill, mais pendant très longtemps j'avais du mal à supporter les mangas. Ca m'énervait au possible, et en dehors des séries que je suivais régulièrement (qui m'énerve aussi par moment, je pense à Bleach et Naruto), je refusais presque d'entendre parler de nouveau.

Je ne me souviens plus comment je suis tombé sur Seven Deadly Sins. Très certainement sur 4chan. En tout cas, j'ai très vite été charmé. Ca parlait de mon genre favori, le médiéval fantastique, plus particulièrement de la mythologie celte et de la matière arthurienne.

Bien que je la connaisse assez mal (surtout quand on a des noms genre Cúchulainn), j'ai toujours apprécié la culture celte qui me paraissait être à mi-chemin entre Rome et les germains, mais aussi empreinte d'une mystique, d'une féerie plus marquée.

Seven Deadly Sins

Cela fait maintenant 10 ans que les Seven Deadly Sins ont été dissous et que plus personne n'a entendu parler d'eux. Il s'agissait d'un groupe de combattants composé des 7 individus les plus dangereux du royaume de Liones. Cependant, ils furent accusés d'avoir tué le chef de l'ordre des Chevaliers Sacrés, et furent contraints de tomber dans la clandestinité.

Cependant, depuis quelques années, les Chevaliers Sacrés deviennent de plus en plus despotiques, et pour tenter de rétablir l'autorité du roi, la princesse Elizabeth souhaite reformer le groupe. Au cours de ces tribulations, elle tombera sur un bar, dont le tavanier est un jeune homme du nom de Meliodas. Après quelques rapides péripéties, elle apprendra que Meliodas n'est ni plus ni moins que Meliodas le Dragon de la Colère, l'ancien capitaine des Sevens Deadly Sins. Ensemble et accompagné de Hawk, un cochon qui parle, ils vont chercher à reformer le groupe afin de remettre les Chevaliers Sacrés à leur place, mais aussi lutter contre la menace qui se prépare dans l'ombre.

J'aime beaucoup les dessins de Seven Deadly Sins. Il y a un mélange "réaliste", cartoonesque que j'apprécie et qui rend les personnages bishonen ou kawaii supportables voire agréables à regarder. L'action est très bien rendue, je m'y attarderais dessus un peu plus tard.

Comme d'habitude, le monde est quelque chose d'assez important pour moi. C'est d'abord ce qui m'a vendu le manga, une espèce de mélange entre la mythologie celte et la matière de Bretagne (qui ne sont pas les mêmes choses). Ainsi des druides, des démons utilisant des geis côtoient des personnages dont les noms sont inspirés des légendes arthuriennes. Un autre point que j'apprécie est l'utilisation de différents peuples, que l'on nomme ici les clans. Au départ, il existe quatre clans, le clan des Hommes, celui des Géants (bon sang, man, Matrona), celui des Fées, et celui des Déesses, qui a disparu. Par la suite seront introduit le clan des Démons (qui avait été scellé 3000 ans auparavant par les Déesses) et leurs vassaux, les Vampires. Ce n'est pas très élaboré, mais c'est présent et j'aime ça.

Concernant les personnages, le groupe des Seven Deadly Sins me fait beaucoup pensé à l'équipage du Chapeau de Paille. A savoir, un groupe très hétéroclite (personne n'appartient au même clan, à part Ban et Escanor, mais c'est discutable) composé de marginaux et de criminels (même si pour l'instant ils ont été accusés de crimes qu'ils n'ont pas commis), qui en dépit d'une réputation terrifiante sont plutôt amicaux. Des 7, mon favori a rapidement été Escanor (même si j'avoue que fem!Ban me met particulièrement mal à l'aise). Certes il y a son pouvoir, mais le personnage est très vite attachant, la nuit il est très touchant, alors que le jour, il est juste jouissif! Avec pour constante son amour pour Merlin. De plus, l'auteur a pris soin de jouer avec les Péchés de tel sorte qu'ils ne correspondent à ce que l'on pourrait attendre. Ainsi, Meliodas, qui porte le Péché de la Colère, n'est pas une brute assoifée de bataille, mais un guerrier rongé par ses remords qui est effrayé de sa propre force.

On le voit, l'écriture est plutôt bien dosé. A savoir, un savant mélange d'humour, et de tristesse, sans tomber dans le pathos, mais aussi de terreur. Le dessin accompagne bien ces émotions. Quand c'est léger, le trait est également léger, et quand c'est pesant, le trait devient beaucoup plus lourd. Je rentre pas dans le détail parce que je veux pas spoilé, mais j'ai de nombreuses scènes en tête, dont à peu près tout ce qui touche au passé des Sins.

Enfin, un point qui est plutôt rafraîchissant dans le genre est de voir que les personnages sont déjà extrêmement puissants. L'action devient épique très vite (des forêts rasées en un coup, des lances lancées à plusieurs kilomètres, etc.), on est pas dans un système classique où le héros est faible, mais avec un potentiel, et doit affronter ses adversaires selon l'algorithme du mal. Dans la première partie du manga, les héros sont assez rarement en réelle difficulté. Ce sont des légendes vivantes et ont les capacités qui vont avec. Autre point positif est que la force brute ne fait pas tout, et chaque personnage possède des capacités spéciales qu'il peut utiliser pour retourner une situation à son avantage. Par exemple, King, n'a presque aucune capacité physique, mais équipé de sa lance, il devient un ennemi effrayant capable de tenir en respect une armée entière. J'avais peur quand j'ai vu que les niveaux de puissance ont été introduits, en dépit du fait qu'ils ont été plutôt bien expliqué dans ce qu'ils signifient et leurs limites. J'avais peur que ça tourne en mesurage de pénis pour déterminer qui est le plus fort (et j'ai toujours peur à ce sujet), mais pour le moment, c'est plutôt léger.

Au final, autant Kill la Kill m'a réconcilié avec l'animation japonaise, Seven Deadly Sins m'a réconcilié avec le manga.

Plus particulièrement, le titre me fais pas mal penser à One Piece, mais à une échelle plus petite. Dans le sens on l'on suit les aventures d'un groupe de marginaux dans un monde de bataille épique où des montagnes peuvent être détruites en un coup. Cependant, là où l'un des thèmes principaux de One Piece est l'ambition (le haki des roi, la volonté du D., les rêves), le thème principal de Seven Deadly Sins est très certainement la rédemption.

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4 septembre 2015 5 04 /09 /septembre /2015 18:17

Toujours dans ma volonté de mieux comprendre l'Afrique, je suis tombé sur les Chroniques de l'Empire N'Tu. Si Imaro fait dans la low fantasy (ne serait-ce que jusqu'à sa dernière partie, et encore), les Chroniques veulent flirter avec la high fantasy la plus épique possible.

J'ai eu la chance de rencontrer l'auteur, M'buze Noogwani Ataye Mieko Momi (il a expliqué son nom, mais j'avoue avoir un peu oublié), un homme accessible et simple, mais ambitieux dans ses projets.

En effet, il veut donner à l'Afriq faire ressortir les marques de noblesse de l'Afrique. Que ce soit en s'investissant dans le milieu associatif et militant panafricain, ou plus récemment en s'essayant à l'écriture et concevant des univers imaginaires qui prendrait leurs racines dans la cosmogonie africaine. Les Chroniques ne sont alors que la première étape d'un projet plus global.

Les Chroniques de l'Empire N'Tu : la Trilogie

Cela maintenant plusieurs décennies que le Empire Ntu connait une paix relative, ayant réussi à se relever d'une crise interne et tenant en respect ses principaux rivaux. Cependant, certains pensent que le vent des réformes doit souffler. En effet, un groupe de jeune nobles souhaite prendre la succession des hommes en place et laisser respirer un système qui commence à se scléroser.

Néanmoins, face aux réticences des autorités en place et aux murmures de puissances étrangères dont certaines viennent de loin au nord, les Jeunes Léopards, tel que l'on les appelle désormais, vont se radicaliser et partir dans une guerre civile qui mettra en danger l'ordre multiséculaire mis en place par le premier empereur Sawati Ier.

Dans ce climat, une jeune noble, Nehesha, qui est sur le point de finir sa formation de guerrière N'Koza se retrouve au cœur des événements. D'abord en se retrouvant seule à la tête de sa famille, mais par le jeu des événements et la volonté divine, elle se retrouvera être l'espoir de l'Empire.

C'est en écrivant cet article que je me suis rendu compte que les Chroniques suivent le parcours initiatique de Nehesha, qui passe de simple apprentie guerrière (d'élite, mais quand même) à celui de commandant en chef, on va dire. Pour pas trop spoiler. Même si les grandes lignes du scénario sont assez claires, surtout quand Momi nous balance ses prophéties ultra-limpide (il aurait pu davantage jouer avec). Au risque de me faire tomber dessus, je me demande ce qui se passerait si on comparait l'aventure de Nehesha avec le Héros aux Mille et Un Visages.

L'un des points qui font que j'apprécie cette trilogie est la manière dont est construit l'Empire. On est là face à un véritable empire, c'est-à-dire différents populations unies autour d'un pouvoir central, et pas juste une simple entité autoritaire et militariste qui cherche à annexer les gentils royaumes voisins. En effet, autour du Trône du Léopard Pourpre se trouvent quatre populations qui bien qu'unis demeurent diverses. D'abord les N'Kozas des montagnes du nord, un peuple de fiers guerrier(es) et d'habiles forgerons, puis les Shandos du Sud, des financiers et des marchands qui savent traiter l'or et surtout le métal précieux qu'est l'Oloy. A ces deux peuples s'allièrent les Ntwari, peuples d'agriculteurs et d'excellents cavaliers des plaines de l'Est et les Nkwilu de l'ouest, un peuple de navigateurs et d'astrologues qui marchandaient avec des peuples venus de loin. A côté de ça, il y a vrai un soin qui est apporté à la description des différentes institutions. Quand je me renseignais sur le bouquin, on faisait le lien avec le Trône de Fer, je pense que c'est mérité. A mes yeux, Westeros est l'un des meilleurs exemples de construction de monde, et l'Empire N'Tu s'inscrit dans ce modèle. Bien qu'étant empreint d'une forte spiritualité, il reste très concret dans son approche. Les lieux sont bien décrits, de même que les équipements et les déplacements des forces. Je reconnais que j'ai pris un vrai plaisir sur toute ces parties.

Une autre richesse de la série est l'absence de personnage véritablement manichéen. Il n'y a pas les gentils noirs d'un côté et les méchants blancs de l'autre. A ce titre, par exemple, Momi avait expliqué que c'est parce que la notion de péché est une notion chrétienne, donc occidentale. Il en est de même pour les notions de Bien et de Mal. Je me souviens par exemple d'une personnage qui bien que du côté des protagonistes est presque du côté obscur, parce que son parcours l'a rendue comme ça. L'auteur prends vraiment le temps de décrire des personnages complexes, parfois tiraillés entre leurs envies et leur devoir, et devant composer avec des événements extérieurs qui ne dépendent pas de leur volonté.

Le principal défaut que je peux trouver aux Chroniques de l'Empire N'Tu en l'état actuel des choses, est le style d'écriture. Je consent que c'est subjectif et que je ne suis pas le mieux placé pour souligner mais qu'est-ce que c'est mal écrit! Je ne parle pas simplement du début qui s'apparente plus à un matraquage de connaissances sur l'Empire qui ne prennent sens que dans les autres tomes, mais de l'ensemble de l'oeuvre. Entre les coquilles (sur lesquelles on peut parfois passer) et les différentes lourdeurs dans le style, j'avais parfois du mal à continuer. Momi nous a confié qu'il a écrit l'ensemble des Chroniques en 6 mois, ça se voit.

Au final, les Chroniques de l'Empire N'Tu constituent, à mes yeux, un apport de qualité au fantastique africain. Certes, cette trilogie n'est pas sans défaut, mais il s'agit d'un premier jet qui vise à emmener d'autres. J'espère néanmoins que l'auteur va prendre, un jour, le temps de relire voire réecrire son oeuvre, dans le cadre d'une réédition notamment.

Cependant, au cours de mes recherches, j'ai réalisé qu'au final l'Empire N'Tu était principalement inspiré de l'Empire Kongo. Ce n'est pas un critique en soi, on parle de ce que l'on connait, et l'auteur est congolais. Mais ce qui m'a fait le plus tiquer est qu'à la toute fin, quand on décide de partir vers d'autres aventures, on se tourne vers l'Est. La aussi, ce sont des choix, mais je me dis que nou devons trouver notre voie.

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27 mars 2015 5 27 /03 /mars /2015 14:21
Imaro

Afin de pouvoir m'éclairer dans ma propre démarche littéraire, j'ai commencé à rechercher des livres dans le style fantastique africain. En fait, il fallait que je quitte mon mode de réflexion, trop "européen" pour que je comprennent comment comprendre l'Afrique (même si tous les africains ne sont pas identiques). Cependant, même je me doutais que ça existait mais je savais que c'était rare.

Je suis tombé sur le cycle Imaro de Charles Saunders. Charles Saunders est un auteur afro-américain qui voulait replacer l'Afrique à sa place dans le fantastique. En effet, durant son enfance, il fut bercé par les lectures de Conan et Tarzan, et même s'il appréciait les aventures de ces héros, il ne pouvait s'empêcher de les trouver racistes.

Il fut alors confronté à un choix : rejeter le fantastique où la civilisation européenne est écrasante, ou commencer à écrire une épopée fantastique qui déroulerait en Afrique et placerait les africains au cœur de cette épopée. Imaro est la conséquence de ce choix.

Imaro

L'action se déroule dans le Nyumbani, une Afrique mythique. Imaro est un membre de la tribu des Ilyassai, un peuple de guerrriers éleveurs dans la grande savane du Tamburure. Cependant, Imaro est part, il est le fils d'aucun père. En effet, sa mère avait refusé de révéler l'identité du père d'Imaro, grand tabou parmi les Ilyassai. Ils avaient cependant accepté d'accueillir l'enfant et de lui offrir la formation de guerrier en contrepartie du fait que sa mère avait mis à jour les machinations du chaman-sorcier de la tribu.

Durant tout sa vie, Imaro devra lutter pour se faire accepter des autres mais aussi s'accepter lui-même. Au cours de ses aventures, il affrontera des hommes, des bêtes sauvages et des démons. Pour autant, il n'a aucune conscience du rôle qu'il doit être amené à jouer dans la lutte entre les Mashataan, les Dieux-Démons, et les Arpenteurs de Nuage. Une lutte qui risque de mettre en péril le Nyumbani tout entier.

Imaro

On sent bien l'influence howardienne ne serait-ce que dans le premier tome. Imaro passe de guerrier éleveur à chef d'une troupe de voleur en quelques pages. Mais cela s'estompe assez vite. Imaro n'est pas Conan. Ce n'est pas un aventurier qui rêve de richesses et de femmes. C'est un guerrier prompt à l’introspection et qui recherche la paix intérieure. Pour autant, il est facile de faire le lien entre la Nyumbani et l'Hyborée. En effet, quiconque à une petite connaissance de l'histoire et de la géographie de l'Afrique pourra faire le lien des étapes de pérégrinations des personnages. Enfin, à travers les Mashataan et leurs serviteurs, on reconnait quelques influences lovecraftiennes que l'on retrouve chez Howard.

Je sais que les deux œuvres sont différentes mais je ne pouvais m'empêcher de faire le lien entre Imaro et Guts de Berserk. Les deux (anti-)héros sont des guerriers orphelins et marginaux à la force et au charisme surhumains qui doivent lutter contre leurs démons tout en étant les pions de puissances qui les dépasse.

Le livre suit une certaine progression, que l'on peut sans doute rapprocher des évolutions chez l'auteur lui-même. Au départ, le récit est assez terre-à-terre, très low fantasy, mais au fur et à mesure que l'on avance, il déploie sa pleine mesure, jusqu'à devenir épique, dans les proportions d'un Seigneur des Anneaux. On passe alors de la réponse de l'Afrique aux héros de pulp, à une aventure autonome.

Conséquence directe, il y a un vrai travail sur les personnages dont même les plus secondaires, ont un embryon d'histoire et de personnalité, avec des rêves et des doutes. Cependant, on peut regretter le fort taux de mortalité, surtout au début.

Un autre point à souligner est le travail de documentation entrepris par l'auteur. Cela se ressent dans les différents royaumes mais aussi dans le vocabulaire qui regorge de noms en langue "locale". Par moment, cela peut être agaçant, notamment quand on parle d'un arem pour évoquer une lance (je ne l'ai su que vers la fin, je croyais qu'un arem était une espèce d'épée courbe).

J'ai beaucoup aimé Imaro. D'abord pour son côté un peu "précurseur" dans le monde fantastique africain, mais aussi parce que je me reconnais un peu dans la personne du guerrier. Solitaire, en quête de son identité ainsi que d'un foyer.

Cependant, je trouve qu'il aurait pu davantage insister sur les divinités primordiales qui sont originaires du Nyumbani afin de casser un peu le côté manichéen du conflit Mashataan/Arpenteurs de Nuages.

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14 décembre 2014 7 14 /12 /décembre /2014 13:20
Trois Cœurs, Trois Lions

Une fois n'est pas coutume, on va parler d'un livre "normal". On retient souvent Tolkien comme l'un des pères de la high fantasy moderne. Il est vrai qu'il a mis à jour nombre des codes du genre. Pour autant, une bonne partie de son oeuvre consistera surtout à poser les bases du genre, et sera complétée par d'autres auteurs. Au rang desquels Poul Anderson.

Bon, on va pas rentrer dans la biographie du bonhomme (je suis sur qu'elle est intéressante, mais là n'est pas notre propos), mais directement dans l'oeuvre qui nous intéresse, Trois Cœurs, Trois Lions.

C'est ce roman qui va en partie inspirer le dualisme Ordre/Chaos que j'affectionne tant. Tant dans Donjons & Dragons que dans les travaux de Moorcook (Elric de Melniboné et tous ses petits copains). J'étais alors assez curieux de voir ce qu'il valait. D'autant plus que j'ambitionne d'écrire un petit quelque chose, un jour.

Holger Carlsen mène une vie relativement classique aux Etats-Unis jusqu'à ce que la Seconde Guerre Mondiale éclate. Il décide alors de retourner dans son Danemark natal pour rejoindre la Résistance. Au cours d'une opération sur le littoral, son groupe se fait attaquer et il reçoit une balle au niveau de la tête.

Quand il se réveille, il n'est plus sur les lieux de l'attaque, ni même au Danemark il semblerait. En effet, il est au coeur d'une forêt, presque nu. Près de lui se trouve un cheval noir puissant qui porte la panoplie du parfait petit chevalier.

Assez rapidement, il réalise qu'il n'est plus au Kansas. Cependant, son esprit cartésien a du mal à appréhender ce qu'il voit, se demandant s'il est mort, s'il hallucine ou si c'est la réalité. En effet, il est arrivé dans un monde où la magie est une réalité, entre ses sorcières, ses enfants-cygnes et ses autres créatures fabuleuses.

Mais au delà de son étonnement, il doit également faire face à une nouvelle donne. Une guerre entre les forces du Chaos et la Loi se prépare, et il a un rôle déterminant à jouer dans celle-ci.

Etant donné que c'est l'un des ouvrages qui a participé à la codification du fantastique moderne, il est classique dans sa progression. Quelques péripéties en marge de l'aventure principale et une fin brutale et inattendue, mais relativement peu d'évolution dans les personnages, qui restent simples.

Si les héros vivent des aventures extraordinaires et effectivement, fantastiques, nous ne sommes pas dans l'épique qui caractérise le Seigneur des Anneaux. Aucune bataille, en dehors de quelques escarmouches, entre les forces de la Loi et du Chaos n'éclate dans les pages du livre., qui est raconté dans les pages. De plus, l'ouvrage est assez court, on est loin des pavés de Tolkien ou Martin. Au final, le livre se rapproche d'avantage du conte dans sa structure.

Le seul point noir que je pourrais reprocher au livre, c'est le manichéisme. J'aime la dualité Ordre/Chaos parce qu'elle permet d'échapper à celle du Bien/Mal et est plus "objective." Pourtant, dans le livre, assez rapidement, on nous comprendre que la La Loi est le Bien et que le Chaos est le Mal. Avec une discussion sur le sujet assez rapidement évacuée.

Cependant, en dépit de sa simplicité, le livre dispose d'un richesse propre. Déjà parce que les personnages sont attachants, et qu'on a envie de les voir réussir leur quête. Mais aussi parce qu'il parvient à mélanger pas mal de références, matière chevaleresque (arthurien et carolingien), contes folkloriques (enfant-cygne, elfes, loup-garou) et désormais grands classiques du genre (dragons, trolls). En plus, il y a la vision rationnelle qu'à Hoger qui offre une certaine "fraîcheur" à l'aventure (il essaie d'appliquer son esprit d'ingénieur à tout ce qu'il rencontre par exemple) plus des connaissances scientifiques. Donnant à l'ensemble une cohérence très agréable.

Très franchement avec la clôture des aventures dans la Terre du Milieu (j'en parlerais dans un prochain article, faut bien que je le vois!), je me demande pourquoi ne pas adapter ce livre? Il a pas l'air spécialement gourmand en effets spéciaux (à part si on fait tout en numériques...), et on peut se permettre de jouer avec son classicisme (oui, il y en aura toujours pour chouiner mais bon)

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