Black Panther

Je n'ai pas envie d'expliquer qui est Black Panther, mais je vais quand même parler de mon rapport à ce personnage. J'ai découvert Black Panther, la panthère noire, dans une encyclopédie Marvel, il y a plus de 13 ans. J'étais fasciné par lui, un superhéros noir, roi de son propre royaume, ultra intelligent, et grosso modo au même niveau que Captain America physiquement. Quand on le regarde, on a l'impression qu'il s'agit de Batman, sauf qu'il est roi et qu'il est noir! En plus, il combinait science et mysticisme. Mais ça s'était arrêté là, pendant des années.

Quand le MCU a pris forme, je n'ai pas pensé à ce personnage, qui est très associé aux Quatre Fantatisques. Et quelle ne fut pas ma surprise quand on a annoncé qu'il aurait son propre film (qu'est-ce que j'aurais aimé que Doctor Doom soit intégré au MCU).

En pleine recherche de moi-même, je me suis dit, pourquoi ne pas chercher à m'inspirer de T'Challa. Je ne me perçois pas particulièrement comme un africain (pour des raisons particulières que je n'ai pas envie d'étaler ici, pour le moment), mais je trouve le côté régalien et polymathe de T'Challa beaucoup plus intéressant que Luce Cage ou Blade. J'étais donc particulièrement intéressé par ce film.

Le film se déroule quelque jours après les événements de Civil War, T'Challa retourne au Wakanda pour se faire couronner comme nouveau roi. 

Cependant, devenir roi n'est pas chose aisée. T'Challa doit d'abord composer avec des rivaux qui veulent s'approprier son trône, mais aussi alors le conservatisme des notables quant à ses projets de réforme du royaume. Enfin, en dehors du pays se prépare une révolution fomentée par des ennemis du royaume qui rêvent de le détruire et mettre la main sur ses montagnes de vibranium, minerai aux propriétés extraordinaires qu'on ne trouve qu'au Wakanda.

Pour affronter tous ces ennemis, T'Challa devra comprendre qu'être un homme bon et un bon roi sont deux choses différentes, et qu'il est également nécessaire de se confronter aux fantômes du passé pour aller vers l'avenir.

Production : Le Wakanda est magnifique. Ce que j'apprécie, c'est que le pays est tout en contraste, croisant technologie ultra-avancé et traditions mystiques, et différents types de territoires, allant de la savane aux montagnes enneigées, avec du fantastique, les mines de vibranium.

J'ai bien aimé la musique du film. De ce que j'ai compris, Kendric Lamar a fait un album qui sert d'OST au film, je n'ai pas trop souvenir de beaucoup de musique urbaine. Si durant les scènes en Corée, et surtout quand Shuri est introduite. J'ai passé un bon moment à la chercher.

Une des raisons qui m'ont poussé à vouloir voir ce film est les costumes. Je suis en pleine de définition de mon style, et je souhaitais voir comment les personnages étaient habillés pour pouvoir m'en inspirer. Sur ce point, je reste un peu sur ma fin. Les tenues avec un côté traditionnel très marqué me laissait assez indifférent parce que je ne m'y reconnais pas outre mesure. Je m'attendais à autre chose au niveau des couleurs, à part du bleu, du violet et du noir, couleurs que je cherche à m'approprier. 

Un point noir (heh) quand même, l'utilisation du numérique. J'avais un peu le sentiment d'être revenu plusieurs années en arrières en voyant certaines scènes (dont le combat final). Enfin, je ne sais pas si c'était à cause de ma place, mais j'avais vraiment du mal avec l'éclairage.

Ecriture : Le Wakanda est un pays technologiquement très avancé, des années en avance sur le reste de cette Terre (qui la rattrape progressivement, mais ce n'est pas un point du film), mais n'est pas nécessairement une utopie. En effet, en dépit de son avance, il est pris dans ses traditions. Ça renforce le contraste avec ce que j'évoquait plus haut, la société wakandaise est (très) conservatrice et isolationniste. Ne cherchant pas à s'intéresser à ce qui se passe à l'extérieur en dehors de menaces potentielles. En outre, j'ai presque envie de dire conséquence de son traditionnalisme, la société semble assez figée, avec ses tribus qui se disputent et son monarque qui peut se voir contester dans un duel.

Le réalisateur a comparé le film à un James Bond, je le comparerais plus, faute d'autres références, à un Game of Thrones, où l'on suit des nobles ou des personnages de pouvoir au travers d'histoires de famille et de lignées et de disputes qui s'étendent sur des générations et où le fils doit payer pour les erreur pour les erreurs de son père. 

En dehors du premier Thor, j'ai vu tous les films du MCU au cinéma, et je dois avouer que c'était la première fois que je voyais autant de noirs pour assister à la projection. Une partie de moi se demande si ce n'est pas juste un hasard, mais j'en doute. Certains ont voulu donner au film une portée émancipatrice en lui affirmant un caractère sociétal voire politique. Je n'ai pas vraiment vu ça. J'ai vu un film d'aventure ou de super-héros, qui se déroulait en Afrique, et où par conséquent, la plupart des personnages étaient d'origine africaine, donc noire. Après, peut-être était-ce voulu. Mais je trouve que certains en ont fait des caisses, et cela pourrait saper le message du film.

Néanmoins, en tapant ces lignes, je me demande si l'un des messages du film (outre le fait que la vengeance est un cycle qui consume tout) qu'il y aurait une espèce de responsabilité de l'Afrique vis-à-vis de ce que l'on appelle la diaspora, et qu'elle pourrait offrir une espèce de refuge à tout ce monde. Peut-être pas un refuge physique et géographique, mais une espèce de refuge moral et spirituel. Un peu comme le Wakanda est comparé à l'El Dorado, mais je comparerais plutôt à une espèce de Xanadu. Mais quand je vois l'état du continent, j'en doute un peu. Par extension, je me demande si le message du film ne va pas à l'encontre de ce que certains voudraient en proposant une action un peu "oncletomesque", sans nécessairement pointer du doigt et avec une portée assez universelle.

En outre, il convient de signaler que le film se suffit à lui-même. Les références à Civil War sont peu nombreuses et n'empêchent pas la compréhension globale du film. Il est donc possible de ne voir que ce film sans s'intéresser aux autres. 

Personnages : On retrouve T'Challa là où l'on a laissé à l'issue de Civil War, il retourne au Wakanda pour assumer ses responsabilités de roi, mais il est changé. Les événements l'ont sans doute conduit à assouplir sa vision sur le monde extérieur. En définitive, il ne connait pas un grand changement (qu'il a eu dans le film précédent, j'ai l'impression), tous les idéaux qu'il expriment à la fin du film sont déjà en train de germer en lui. Pourtant, il réalise qu'il doit parvenir à trouver sa voie dans un monde qui change de plus en plus et qui ne pourra plus supporter la neutralité du Wakanda. Je n'ai pas grand chose à rajouter sur la famille royale du Wakanda, à part sur Shuri qui change du comics où elle est beaucoup plus portée sur les traditions et la spiritualité, alors qu'ici elle est la tête de pont de la technologie wakandaise. En plus l'actrice est plutôt mignonne. A côté de ça, on pourrait parler de Okoye et Nakia qui incarnent les deux pôles qui tentent T'Challa, Okoye, la militaire et la grande soeur, qui porte les couleurs du clan traditionnaliste et préfère l'isolement du Wakanda, et Nakia, l'amante (je n'aime pas les connotations de "maîtresses" et "copine" n'est pas approprié à mon sens) souhaiterait elle que le Wakanda s'ouvre et apporte son aide aux noirs en souffrance dans le monde, ce qu'elle fait à son échelle.

Quelque chose qui m'a fait marrer, c'est que si l'on prends les 3 principaux Avengers dans la continuité des films (Captain America, Iron Man et Thor), on constate qu'il s'agit de hommes blancs avec leur meilleur pote noir et qui, en dehors d'Heimdall, ont fait partie de la Air Force et savent "voler". La situation est un peu inversée ici. J'ignore si Ross est le meilleur pote de T'Challa, mais il est un ami blanc d'un superhéros noir qui sait voler.

Enfin, les méchants. Tout d'abord, Klaue qui est présenté comme l'antagoniste principal. On voit qu'Andy Serkis prend son pied en jouant ce personnage. Cependant, je regrette un tout petit peu qu'on mette de côté l'aspect scientifique du personnage pour en faire un contrebandier et un trafiquant d'armes (je me demande si ce n'est pas pour accentuer le côté "méchant colonisateur" que le personnage peut avoir). Ensuite Eric Killmonger. Le personnage est vraiment intéressant. Il a grandi en entendant les histoires d'un royaume extraordinaire et quasi-magique où les noirs étaient plus que riches financièrement, mais toute sa vie, il a du supporter les conditions de vie d'un noir orphelin et pauvre et le racisme aux Etats-Unis. Pire, le royaume magique en question l'a trahi et abandonné à son sort. Et au final, on ne se pas trop où il se situe. Souhaite-il réellement permettre l'émancipation des noirs dans le monde ou veut-il juste se venger du Wakanda en brûlant tout? Sur le papier, beaucoup de ses arguments tiennent la route, et en cela, il constitue un obstacle pour T'Challa, ce qu'il doit combattre pour pouvoir avancer. Pas simplement physiquement mais idéologiquement. D'un certains point de vue, il m'a fait penser à moi. Pas nécessairement dans l'aspect extrémiste ou même dans ses capacités, mais dans son rapport à sa culture. Il la connait mais ne l'utilise que pour accomplir ses objectifs, ce qui pour lui signifier renverser le royaume et prendre sa vengeance sur les blancs.

En définitive, j'ai bien aimé Black Panther, mais pas pour les raisons qu'on aurait pu croire. C'est un film de super héros sympa et un bon rajout au Marvel Cinematic Universe. 

Néanmoins, le film ne m'a touché, là où on pourrait croire qu'il aurait pu. En ce moment, je suis pleine redéfinition sur tout ce qu'est ma vie et ce que je veux en faire. Je me rapproche de mes 30 ans, et j'ai souvent le sentiment que mes meilleures années sont derrière moi. En regardant le film, j'ai réalisé que la plupart des acteurs principaux ont plus de 30 ans, Chadwick Boseman a 40 ans, Lupita Nyong'o a 35 ans et Mickael B. Jordan a 31 ans. Et pourtant, ça ne les empêche pas d'être à leur zénith.

Une chose m'a fait tiquer sur le côté "politico-sociétal" du film. Avant sa mort, Killmonger a demandé à être jeté à la mer, comme ses frères et soeurs qui ont préféré se jeter à la mer plutôt que subir l'esclavage. Si je peux comprendre la perception du personnage (et de ceux qui s'en sont réclamés par la suite), je ne la partage pas. Je me vois comme un descendant d'esclaves, et je pense que mes ancêtres étaient ceux qui avaient la volonté de vivre, l'endurance pour subir l'esclavage et le désir de perpétuer la vie.